Nous évoquions dans un précédent article l’impact de l’IA sur la calibration de l’offre et des prix. Cette calibration est indissociable de l’amélioration de l’expérience client et de la communication. Cet autre chantier est déterminant pour le secteur du retail, qui voit le budget des consommateurs consacré aux achats diminuer lentement mais sûrement.
Baisse du CA : moins de clients mais plus de data.
La crise actuelle a acté assez violemment une diminution de budget des consommateurs. En dehors du secteur alimentaire qui a gagné 20% de vente, le coronavirus a mis en avant la volatilité de la clientèle, moins loyale et surtout en recherche de la plus grande simplicité de parcours compatibles avec les mesures de protection sanitaire. De grandes enseignes bien connues des français comme Naf Naf ou Camaieu sont en redressement judiciaire. Bien que ces chutes aient été précipitées par les événements, elles sont surtout l’expression de défis non relevés depuis une dizaine d’année.
“ Le secteur traversait déjà une période difficile, explique Gildas Minvielle, directeur de l'Observatoire économique de l'Institut français de la mode. En moyenne, depuis l'année 2007, l'évolution du chiffre d'affaires des distributeurs recule. Sur l'ensemble de la période, il a reculé d'un peu plus de 15%.". Face à une baisse globale du chiffre d’affaire, les canaux de différenciation ne sont pas les produits eux-même, qui dans le cas de vêtements de milieux de gamme n’est “que” une affaire de goût. La différenciation vient de l’utilisation des données que les enseignes collectent de mieux en mieux.
Il faut donc jouer avec ces data sur un autre tableau : choyer les clients pour les conserver, avec une expérience d’achat absolument fluide et une personnalisation soigneusement dosée pour être bienvenue. Et en e-commerce, “ La plupart des sites mobiles sont à des années lumières de ce que les clients attendent : 19 secondes pour télécharger un site mobile via un réseau 3G alors qu’au-delà de 3 secondes 53% des clients zappent sur un autre site. “ précise François Loviton, Directeur Brands & Retail chez Google France.
Il ya donc l’optimisation perpétuelle des sites de ventes, mais aussi la capacité à suivre le client en passant d’un canal à l’autre : un site, un site revendeur, en boutique… Afin d’identifier et optimiser les parcours les plus susceptibles de convertir, l’IA est un atout précieux permettant d’identifier des shémas fructueux. On peut citer l’exemple du groupe Etam, qui a lancé un algorithme capable de voir des signaux faibles sur certains produits qui se vendent "discrètement". L’intelligence artificielle scrute toutes les ventes online et offline. L’information est ensuite remontée aux magasins pour qu’ils aient conscience de "ces best-sellers qui ne se voient pas". Objectif pour Jean-Bernard Della Chiesa, directeur innovation du groupe Etam ? Améliorer le merchandising de ces références.
Cette meilleure compréhension des intentions des clients, ou encore la personnalisation des suggestions, via des coupons individuels, sont par exemple de belles promesses de l’IA qui nécessitent d’être travaillées à fond pour offrir cette différenciation tant cherchée.
Bienvenue dans l’ère de l’assistance : personnalisation client et parcours omni-canal.
Au sein de son Hub Digital, Carrefour expérimente avec Google des usecases prioritaires qui touchent aussi bien à l’optimisation en commerce de proximité qu’à la personnalisation des coupons, ou encore l’analyse automatisée de l’assortiment. Grâce à la personnalisation, les services sont plus efficaces et pertinents pour l’utilisateur et bénéficient tant à l’entreprise qu’au client.
Toujours chez Carrefour, sous la direction de Amélie Oudéa-Castera du Hub Digital, une prédiction des promotions à commander est en phase d’industrialisation. Ces produits partent souvent plus vite et “un meilleur calibrage des niveaux de commande permettrait d’apporter plus de 100 millions d’euros de chiffre d’affaires”. Combiné à la création de Léon, assistant virtuel d’aide aux courses en ligne, cette création d’algorithme démontre que Carrefour a bien compris qu’il fallait de plus en plus accompagner le client avec une assistance pertinente. Lui faire gagner du temps en le comprenant profondément grâce à ses données, et ne pas seulement lui proposer passivement des produits qu’il trouverait, de toute façon, ailleurs.
Voilà une tendance que le monde du retail français ne doit pas laisser passer. La fonction search devient plus intelligente et plus prédictive sur les sites : on est passé de l’indexation de lien à une recherche sémantique, avec des alertes pro-active. De nouvelles manières de chercher un article, par l’image ou par la voix, ont vu le jour. La conjugaison du machine learning et des objets connectés, devront amener jusque dans les boutiques physique et cette logique d’assistant intelligent via des conversations qui seront une forme évoluée de ce que l’on fait aujourd’hui en cherchant un produit.
Marqués par une crise créant de la distance physique, les retailers doivent appréhender cette révolution pour pouvoir se transformer relever. “Retail is detail! “
Sources :
https://www.usine-digitale.fr/article/lab-carrefour-google-les-10-grandes-innovations-testees-par-le-distributeur
https://siecledigital.fr/2020/05/25/le-retail-a-lepreuve-de-la-crise-du-covid-19/